Historique de l’exploitation charbonnière dans l’ex-bassin minier du Nord/Pas-de-Calais

 

 

LA PERIODE REVOLUTIONNAIRE

La Révolution et les guerres qui suivent mettent en difficulté les jeunes compagnies minières du Nord de la France. C’est d’abord l’émigration des nobles contraints de fuir le nouveau régime qui entrave la bonne marche des sociétés, puis le départ de nombreux ouvriers recrutés à la déclaration de guerre contre François II empereur d’Autriche en avril 1792, et enfin l’avance autrichienne en 1793.

L’occupation de Valenciennes s’accompagne de la destruction de la plupart des exploitations minières de la région. Si la situation d’Anzin n’est guère brillante, celle d’Aniche se révèle particulièrement désastreuse.

Les dirigeants des deux compagnies, restés en France, s’efforcent de mettre tout en œuvre pour redresser la situation. Ils sont favorisés en cela par la loi du 17 frimaire an III (7 décembre 1795) qui autorise les citoyens intéressés  dans les établissements de commerce ou manufactures, dont un ou plusieurs associés sont frappés de confiscation, à racheter à la Nation les parts confisquées. 

Stanislas Désandrouin et son fondé de pouvoir, Jacques Renard, parviennent à rassembler les capitaux nécessaires au rachat de la Compagnie des Mines d’Anzin. La situation, en revanche, est plus facile pour celle d’Aniche du fait que son déficit incite l’administration du district de Douai à abandonner les parts de la République aux associés de la Société.

A partir de 1800, les anciens associés, de retour au pays, réclament leur dû aux deux compagnies.  Celle d’Aniche refuse de leur restituer. Un accord est conclu avec celle d’Anzin. Ces compagnies rendront finalement un quart des actions que leurs associés possèdent.

En 1810, le Gouvernement impérial de Napoléon Ier Bonaparte (1769-1821) renforce par décret du 21 avril la présence de l’Etat en définissant les nouvelles conditions d’exploitation du charbon et en instituant « la propriété perpétuelle des concessions », qui ne sera remise en cause qu’en 1919.

Les principes généraux de la loi du 21 avril 1810 sont les suivantes :

 

Cette loi recevra quelques modifications dans le sens du renforcement du pouvoir de l’Etat par la loi du 9 septembre 1919 qui consacrera la prédominance  à caractère administratif de la concession et la mainmise de fait de l’Etat sur les gisements les plus importants.

Avec la chute de l’Empire napoléonien en 1815 et le retour à la paix, une nouvelle ère de prospérité s’ouvre pour la Compagnie d’Anzin qui mène alors une vaste campagne de sondages et ouvre de nouveaux puits dans les parties inexplorées du vaste territoire qui est en sa possession.

Cependant, un obstacle imprévu arrêtera pendant des années le fonçage des puits dans cette direction. C’est lors du creusement en 1765 du puits Dutemple n°1 à Valenciennes que les exploitants ont  rencontré, à la surface du terrain houiller, sous les argiles plastiques ou « dièves », qui protègent ce terrain contre les eaux des niveaux supérieurs, une couche sableuse imprégnée d’eau salée à laquelle ils ont attribué le nom de « Torrent ». 

L’épaisseur de cette formation très aquifère considérée comme un dernier vestige de la mer crétacée  atteignait 9 à 10 mètres au centre de la dépression qu’elle remplissait entre St Waast et Denain, sur 8 kilomètres de longueur et 4 de largeur.

Elle ne pourra être traversé qu’en 1826 à St Waast, grâce aux nombreuses machines d’exhaure mises en service sur huit puits où elle avait été rencontrée, et au creusement d’une longue galerie souterraine destinée à évacuer directement  les eaux dans l’Escaut sans les remonter à la surface par les puits.

En attendant son assèchement, la Compagnie des Mines d’Anzin oriente ses recherches au-delà du Torrent. En 1822, elle découvre le charbon gras à Abscon, à l’extrémité Ouest de ses concessions et en 1828, elle le rencontre par la fosse Villars à Denain où une concession éponyme lui est accordée.

 

Schéma de la fosse Villars à Denain

(Source : CHARBONNAGES DE FRANCE)

 

De nouvelles machines d’extraction font leur apparition. Le transport du charbon connaît, à partir de 1825, un énorme progrès grâce aux chariots sur roues à gorges, ancêtres des berlines, circulant sur les voies ferrées de 0,40 mètre de large. Les puits, jusqu’alors de forme carrée, prennent la forme circulaire et de plus grand diamètre.             

Industrie charbonnière de pointe, la Compagnie d’Anzin pouvait affirmer, en 1830, dans un mémoire adressé au Préfet du Nord, que son « exemple avait nationalisé en France l’art d’exploiter les mines, et fait naître dans le Nord et dans le Midi de nombreuses exploitations qui assurent la prospérité de notre industrie ». 

L’administration de la Compagnie s’étendant sur un vaste territoire divisé en plusieurs exploitations éloignées les unes des autres, exige un personnel important et qualifié. Elle forme elle-même à l’école pratique de ses travaux les chefs du fond, qu’elle choisit dans les rangs de ses ouvriers et employés.

En 1855, elle occupe 6.000 ouvriers employés à l’extraction de la houille, et plus de 1.000 ouvriers répartis dans ses divers chantiers et ateliers de construction et d’entretien. 75 chevaux et ânes sont employés au transport du charbon dans ses exploitations.

C’est autour de ces sources du combustible minéral et attirés par lui que sont venus s’implanter les hauts fourneaux, forges et laminoirs de Denain et d’Anzin, les ateliers de construction Derosme et Cail et une foule d’industries qui ont fait de l’arrondissement de Valenciennes l’un des centres industriels les plus importants du monde.

   

Vue générale de la Fosse Renard, des Forges et des Ateliers (Vers 1906)

(Collection Jean-Marie MINOT)